Rapport annuel 2019-2020

Table des matières

    Encourager des milieux de travail justes et productifs

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    « L’objectif du Conseil est d’aider les employeurs, les employés et les syndicats qui les représentent à résoudre leurs différends rapidement, afin d’en réduire au minimum les éventuelles répercussions négatives dans les milieux de travail. » 

    —Ginette Brazeau, présidente, Conseil canadien des relations industrielles

    Mot de la présidente

    Ginette Brazeau, Chairperson, Canada Industrial Relations Board

    Je suis heureuse de présenter au Parlement et aux Canadiens et Canadiennes le rapport annuel sur le rendement du Conseil canadien des relations industrielles (le CCRI ou le Conseil), pour l’exercice se terminant le 31 mars 2020.

    Ces dernières années, le Conseil a dû composer avec des changements continus. À cet égard, l’exercice 2019-2020 n’a pas été différent des précédents, le Conseil ayant été investi de nouvelles responsabilités sous le régime de la partie II (Santé et sécurité au travail) et de la partie III (Durée normale du travail, salaire, congés et jours fériés) du Code canadien du travail, et sous le régime de la Loi sur le Programme de protection des salariés. Ces nouveaux mandats ont entraîné un élargissement considérable des domaines d’expertise du Conseil, ainsi qu’une augmentation importante de son volume d’affaires. Tout au long de l’année, nous avons concentré nos efforts sur la mise en place des procédures et consignes nécessaires pour traiter les nouveaux types d’affaires dont le Conseil est saisi, tout en maintenant ou en améliorant notre taux de réponse au regard de l’ensemble des demandes et des plaintes présentées au Conseil. Par ailleurs, afin de venir en aide au Conseil dans ses efforts pour s’acquitter de sa charge de travail accrue, le gouverneur en conseil a renouvelé le mandat de deux vice-présidents du Conseil et a nommé trois vice-présidents supplémentaires. 

    Ces nominations sont les bienvenues, car elles garantissent la stabilité et la prévisibilité des ressources décisionnelles du Conseil pour les cinq prochaines années.

    Comme le montrera le présent rapport, les délais de traitement moyens des plaintes et des demandes se sont améliorés par rapport à l’exercice précédent. Toutefois, il est également manifeste, vu l’augmentation de la charge de travail, qu’il faut en faire davantage pour que le Conseil soit en mesure d’assurer des services en temps opportun aux personnes qui ont besoin de son assistance. C’est ce qui demeurera au cœur de nos efforts.

    Le Conseil prépare également sa transition vers un nouveau système de gestion des affaires. Des efforts et des ressources considérables ont été investis pour mener à terme les travaux nécessaires à la mise en œuvre d’un nouveau système, grâce auquel les pratiques de gestion des affaires du Conseil reposeront sur des technologies modernes. Les nouveaux outils technologiques optimisés amélioreront l’accès aux dossiers et communications électroniques et aux rapports sur le rendement, et les rendront plus faciles à utiliser.

    L’objectif principal du Conseil, au cours de cette période de changement et de transition, a été d’aider les employeurs, les employés et les syndicats qui les représentent à résoudre leurs différends rapidement, afin d’en réduire au minimum les éventuelles répercussions négatives dans les milieux de travail. Le Conseil travaille d’arrache-pied pour répondre aux besoins et aux attentes de la communauté des relations du travail, et mes collègues méritent des félicitations pour leur engagement et leur dévouement. En tant qu’équipe, nous sommes vraiment déterminés à établir des relations du travail positives dans les milieux de travail assujettis à la compétence fédérale.

    Section 1 – Le Conseil : En quoi consiste-t-il?

    Composition

    Le Code canadien du travail (le Code) prévoit que le Conseil canadien des relations industrielles (le CCRI ou le Conseil) doit être composé d’un président neutre, nommé à temps plein, d’au moins deux vice-présidents neutres, nommés à temps plein, ainsi que d’un maximum de six autres membres nommés à temps plein, représentant à nombre égal les employeurs et les employés. Des vice-présidents et des membres à temps partiel peuvent également être nommés pour siéger au CCRI. Le président et les vice-présidents du CCRI doivent avoir une expérience et des compétences dans le domaine des relations industrielles.

    À la fin de l’exercice, le Conseil était composé des personnes suivantes :

    Présidente :

    Ginette Brazeau a été nommée présidente pour la première fois le 28 décembre 2014, après avoir occupé le poste de directrice exécutive et avocate générale du CCRI. Son mandat actuel prendra fin le 27 décembre 2024.

    5 vice-présidents nommés à temps plein :

    Annie G. Berthiaume, dont le mandat se terminera le 25 janvier 2025
    Louise Fecteau, dont le mandat se terminera le 30 novembre 2025
    Sylvie M.D. Guilbert, dont le mandat se terminera le 1er juillet 2024
    Roland A. Hackl, dont le mandat se terminera le 1er juillet 2024
    Allison Smith, dont le mandat se terminera le 4 janvier 2025

    3 vice-présidents nommés à temps partiel :

    Paul Love, dont le mandat se terminera le 30 novembre 2025
    Lynne Poirier, dont le mandat se terminera le 28 novembre 2025
    Jennifer Webster, dont le mandat se terminera le 30 juin 2024

    4 membres représentant les employeurs :

    Richard Brabander, dont le mandat se terminera le 29 décembre 2023 (membre à temps plein)
    Thomas Brady, dont le mandat se terminera le 28 mai 2021 (membre à temps plein)
    Barbara Mittleman, dont le mandat se terminera le 20 décembre 2023 (membre à temps partiel)
    Poste vacant, (membre à temps plein)

    4 membres représentant les employés :

    Lisa Addario, dont le mandat se terminera le 24 juin 2024 (membre à temps plein)
    Gaétan Ménard, dont le mandat se terminera le 25 février 2024 (membre à temps plein)
    Daniel Thimineur, dont le mandat se terminera le 10 mai 2024 (membre à temps plein)
    Paul Moist, dont le mandat se terminera le 20 décembre 2023 (membre à temps partiel)

    Suivant le paragraphe 12(2) du Code, un membre dont le mandat est arrivé à échéance peut mener à leur terme les tâches qui lui ont été confiées pendant la durée de son mandat.

    En outre, le président a, en vertu de la loi, le pouvoir de nommer des arbitres externes pour statuer sur des affaires relevant de la partie II ou de la partie III du Code.

    Visitez le site Web du Conseil pour consulter la liste des membres actuels et vous renseigner sur leurs qualifications

    Notre compétence

    Mandat général

    Le CCRI est un tribunal quasi judiciaire, indépendant et représentatif, qui est chargé d’interpréter et d’appliquer la partie I (Relations du travail) et certaines dispositions de la partie II (Santé et sécurité au travail) et de la partie III (Durée normale du travail, salaire, congés et jours fériés) du Code. Le CCRI est également chargé d’interpréter et d’appliquer la partie II (Relations professionnelles) de la Loi sur le statut de l’artiste et de trancher les appels interjetés en vertu de la Loi sur le Programme de protection des salariés.

    Le Conseil a pour mandat de favoriser l’établissement et le maintien d’un climat de relations du travail harmonieuses dans les secteurs d’activités relevant de la compétence fédérale, tout en veillant au respect des lois en matière de santé et sécurité et à l’application des normes d’emploi minimales dans les milieux de travail fédéraux.

    Secteurs relevant de la compétence du Conseil

    Le CCRI, qui exerce ses pouvoirs dans l’ensemble des provinces et territoires, régit les relations du travail des entreprises fédérales. Ces dernières font habituellement partie des secteurs suivants :

    • la radiodiffusion (radio et télévision)
    • les banques à charte
    • les services postaux
    • les aéroports et le transport aérien
    • le transport maritime et la navigation
    • les canaux, pipelines, tunnels et ponts (interprovinciaux)
    • les entreprises de transport ferroviaire et routier interprovinciales et internationales
    • les télécommunications
    • la manutention du grain et l’extraction et le traitement de l’uranium
    • la plupart des activités des secteurs public et privé au Yukon, au Nunavut et dans
    • les Territoires du Nord-Ouest
    • certaines entreprises des Premières Nations
    • les sociétés d’État fédérales (par exemple, les musées nationaux)

    La compétence du Conseil s’applique à environ 900 000 employés et à leurs employeurs (12 000), et elle englobe des entreprises dont les activités ont une incidence importante pour l’ensemble des Canadiens et des Canadiennes sur les plans économique, social et culturel. La diversité, la répartition géographique ainsi que l’importance pour le pays des activités du secteur privé de compétence fédérale contribuent à rendre uniques la juridiction fédérale et le rôle dévolu au CCRI.

    Partie II du Code (Santé et sécurité au travail)

    En plus des secteurs listés ci-dessus, le Conseil a aussi compétence sur la fonction publique fédérale lorsqu’il s’agit de statuer sur des demandes d’appels de décisions rendues par le ministre du Travail (le ministre) relativement à des refus de travailler en cas de danger, ou contre des instructions données par le ministre en vertu des lois en matière de santé et sécurité.

    La fonction publique fédérale englobe quelque 250 000 employés, les divers ministères fédéraux de même que des employeurs distincts. 

    Loi sur le statut de l’artiste

    Le Conseil est également responsable de l’interprétation et de l’application de la partie II (Relations professionnelles) de la Loi sur le statut de l’artiste, laquelle s’applique non seulement aux radiodiffuseurs et aux sociétés d’État, mais également à des ministères et organismes fédéraux.

    Section 2 – Que fait le Conseil?

    Le Conseil canadien des relations industrielles (le CCRI ou le Conseil) joue un rôle vital en ce qui touche la reconnaissance et la protection des droits des employés, des syndicats et des employeurs. Suivant la politique énoncée dans le Code canadien du travail (le Code), le Conseil favorise le bien-être des travailleurs, des syndicats et des employeurs canadiens par l’encouragement des libres négociations collectives et du règlement positif des différends.

    Responsabilités particulières du Conseil 

    Partie I du Code (Relations du travail)

    Le CCRI est chargé d’interpréter et d’appliquer les dispositions de la partie I (Relations du travail) du Code. Bon nombre des activités du Conseil découlent de ce rôle, puisque des questions de relations du travail très diversifiées peuvent être soulevées dans les plaintes et demandes dont il est saisi.

    Plus précisément, le Conseil peut :

    • déterminer qui a le statut d’employeur ou d’employé;
    • définir les unités de négociation habiles à négocier collectivement;
    • accorder, modifier et révoquer des droits de négociation collective;
    • mener des enquêtes sur des plaintes de pratiques déloyales de travail, trancher ces plaintes ou encore les régler au moyen de la médiation;
    • rendre des ordonnances d’interdiction dans les cas de grèves et de lock-out illégaux;
    • établir si les activités de certains employeurs relèvent des chefs de compétence constitutionnelle fédéraux
    • régler des problèmes complexes de relations du travail découlant de fusions ou d’acquisitions d’entreprises;
    • établir les niveaux de services qui doivent être maintenus au cours d’un arrêt de travail légal afin de prévenir des risques imminents et graves pour la santé ou la sécurité du public.

    Le Conseil entreprend ces tâches avec la ferme résolution de traiter, d’instruire et de trancher toutes les affaires dont il est saisi rapidement et de manière juste et économique. Avant de trancher les affaires, il intervient activement pour aider les parties à résoudre leurs différends grâce à la médiation ou à des modes substitutifs de règlement des différends.

    Partie II du Code (Santé et sécurité au travail)

    Le CCRI est également responsable de trancher certaines affaires sous le régime de la partie II (Santé et sécurité au travail) du Code. Dans le cadre de ce mandat, le Conseil instruit et tranche des plaintes en matière de représailles, lorsque des employés affirment avoir fait l’objet de mesures disciplinaires ou avoir été congédiés parce qu’ils ont exercé les droits que leur confèrent les lois en matière de santé et sécurité. En outre, depuis le 29 juillet 2019, le Conseil est chargé d’instruire et de trancher les demandes d’appel qui concernent soit des décisions du ministre relatives à des refus de travailler, soit des instructions données à des employeurs par le ministre.

    Plus précisément, dans le contexte d’un refus de travailler, un employé peut interjeter appel devant le Conseil d’une décision du ministre lorsque ce dernier :

    1. a conclu à l’absence de danger;
    2. a conclu à l’existence d’un danger, mais que celui-ci constitue une condition normale de l’emploi;
    3. a conclu à l’existence d’un danger, mais que le refus met directement en danger la vie, la santé ou la sécurité d’une autre personne.

    De plus, un employeur, un employé ou un syndicat en désaccord avec des instructions données par le ministre peut contester ces instructions en présentant une demande d’appel au Conseil.

    Ces appels sont des appels prévus par la loi, ce qui signifie que le Conseil examinera chaque dossier en prenant en considération tous les nouveaux éléments de preuve et renseignements disponibles présentés par l’une ou l’autre des parties à l’appel.

    Partie III du Code (Durée normale du travail, salaire, congés et jours fériés)

    Dans le cadre de son nouveau mandat élargi, le Conseil est chargé d’assurer des services de médiation et de rendre des décisions dans des affaires qui concernent :

    • des plaintes de congédiement injuste déposées par des employés qui ne sont pas représentés par un syndicat;
    • des appels en recouvrement du salaire, lorsqu’un employeur ou un employé n’est pas d’accord avec la décision ou l’ordre de paiement d’un inspecteur;
    • des plaintes en matière de représailles, déposées par des employés qui estiment que leur employeur a usé de représailles contre eux parce qu’ils ont exercé les droits que leur confère la législation sur les normes du travail.

    Autres

    Le CCRI est également responsable des relations professionnelles entre les artistes autonomes et les producteurs dans les entreprises de radiodiffusion de compétence fédérale, les ministères et organismes du gouvernement fédéral et les sociétés d’État, en vertu de la Loi sur le statut de l’artiste. Cette responsabilité comprend la détermination des secteurs d’activités culturelles qui se prêtent aux négociations collectives, de même que l’accréditation d’associations d’artistes dans ces secteurs.

    Depuis le 29 juillet 2019, le Conseil est chargé de statuer sur les demandes d’appel visant des décisions prises par le ministre sous le régime de la Loi sur le Programme de protection des salariés. Dans ces affaires, le Conseil passe le dossier en revue afin d’établir si la décision du ministre est entachée d’une erreur de droit ou d’une erreur relative à la compétence.

    Activités de liaison

    Le Conseil appuie les efforts collectifs déployés par les syndicats et les organisations patronales dans le but d’établir des relations saines et de résoudre les différends grâce à des méthodes constructives. Il prend donc part activement à des activités de liaison, tant à l’échelle nationale qu’internationale. Ces activités de liaison permettent au Conseil de prendre connaissance des besoins des employeurs, des travailleurs et des organisations syndicales qui les représentent, et d’élaborer et d’appliquer avec constance des pratiques exemplaires dans la prestation de ses services. Certaines des activités de liaison auxquelles le Conseil prend part sont décrites ci-dessous.

    Comité de consultation de la clientèle du CCRI

    Le Conseil entretient un dialogue avec ses clients par l’entremise de son Comité de consultation de la clientèle (le Comité), afin de renforcer ses liens avec ses communautés de clients et d’obtenir des commentaires de celles-ci. Le Comité donne des conseils et fait des recommandations au président du Conseil quant aux meilleurs moyens que le CCRI peut employer pour réaliser son mandat et répondre aux besoins de ses clients.

    Le Comité est constitué de représentants choisis par les principaux groupes de clients du Conseil, notamment les suivants :

    • Employeurs des transports et communications de régie fédérale (ETCOF);
    • Congrès du travail du Canada (CTC);
    • Confédération des syndicats nationaux (CSN);
    • Association canadienne des avocats du mouvement syndical (ACAMS) (qui représente les avocats des parties syndicales);
    • Association canadienne des avocats d’employeurs (ACAE) (qui représente les avocats des parties patronales).

    Le Comité s’est réuni trois fois au cours de l’exercice 2019-2020. Les discussions se sont encore concentrées sur le rendement du Conseil et ont également porté sur la mise en œuvre des changements législatifs par suite desquels de nouveaux domaines de responsabilité ont été attribués au Conseil. Le Comité a en particulier communiqué des orientations et des conseils à la présidente relativement à la sélection des arbitres externes qui peuvent être désignés pour statuer sur les plaintes de congédiement injuste et les appels en matière de recouvrement du salaire.

    Conférence nationale sur les relations industrielles

    Le Conseil a de nouveau travaillé en partenariat avec le Service fédéral de médiation et de conciliation pour tenir avec succès, en septembre 2019, une nouvelle édition de la Conférence nationale sur les relations industrielles. La Conférence propose un programme unique, qui rassemble des représentants des parties patronales et syndicales de l’ensemble du Canada pour discuter des principaux enjeux du moment. Les sujets abordés lors de la Conférence concernaient principalement l’avenir du travail et les changements qui redéfinissent déjà les milieux de travail. Des cas de réussites exemplaires en matière de partenariats patronaux-syndicaux y ont également été présentés.

    La Conférence a attiré plus de 200 délégués de tous les secteurs de compétence fédérale. Le succès remporté témoigne du dynamisme du milieu des relations du travail assujetti à la compétence fédérale, en plus de faire ressortir la nécessité que de tels forums soient encore tenus afin de permettre aux représentants patronaux et syndicaux de tisser des liens et de tirer parti de ces relations pour favoriser des milieux de travail productifs et harmonieux.

    Autres forums nationaux et internationaux

    Le Conseil prend part au concours de plaidoirie Laskin et aux séances simulées d’arbitrage de conflits de travail, lesquels offrent aux étudiants en droit du travail des occasions d’apprentissage pratique.

    La présidente, les autres membres et les agents du Conseil participent également à des activités de liaison à l’échelle nationale et internationale.

    La présidente participe à la rencontre annuelle des présidents et présidentes des tribunaux de relations du travail du Canada. Cette réunion est une occasion de faire le point sur le contexte réel dans lequel les différents tribunaux des relations du travail du Canada exercent leurs activités, et de cerner les tendances dans l’ensemble du pays afin d’élaborer et de mettre en œuvre des mécanismes permettant de mieux s’adapter et de mieux répondre aux besoins des parties qui se présentent devant le Conseil.

    Le Conseil joue par ailleurs un rôle de chef de file au sein de certaines organisations internationales dont l’objectif est de soutenir les organismes gouvernementaux qui ont pour mandat de promouvoir des relations du travail harmonieuses et la résolution des différends basée sur les intérêts communs des parties. La participation active du CCRI aux travaux de l’Association of Labor Relations Agencies et du Forum international des agences de résolution de différends en matière de relations du travail et de l’emploi permet un dialogue élargi sur les défis et tendances qui font leur apparition dans les milieux de travail modernes. Ces forums fournissent également au Conseil un accès précieux à des pratiques exemplaires, qu’il peut reproduire afin d’améliorer son rendement, d’optimiser ses ressources et d’accroître la portée de ses services.

    Section 3 – Réalisations du Conseil

    Rendement du Conseil

    Nombre de demandes de renseignements reçues par l’intermédiaire de la ligne 1-800 du Conseil en 2019-2020 : 2 482 appels, comparativement à 1 584 au cours de l’exercice précédent.

    Volume d’affaires

    La nature de la demande pour les services du Conseil canadien des relations industrielles (le Conseil) varie d’une année à l’autre en fonction de différents facteurs, comme la conjoncture économique. Le nombre de demandes et de plaintes reçues au cours du dernier exercice a augmenté considérablement par rapport aux exercices précédents. Cette augmentation du volume d’affaires, de 36 %, est en grande partie attribuable aux nouveaux mandats qui ont été transférés au Conseil le 29 juillet 2019. Au total, 675 demandes et plaintes ont été reçues au cours de l’exercice 2019-2020. De ce nombre, 121 affaires correspondaient à des plaintes de congédiement injuste ou à des appels en matière de recouvrement du salaire relevant de la partie III du Code canadien du travail (le Code), ce qui représente 18 % des affaires reçues au cours de l’exercice. Le Conseil a reçu, en vertu de la partie II du Code, 22 demandes d’appel concernant des décisions prises par le ministre. Lorsqu’on ajoute les plaintes concernant des mesures de représailles prises par des employeurs, le nombre total d’affaires relevant de la partie II du Code représente 10,7 % du nombre d’affaires reçues par le Conseil.

    Le nombre d’affaires réglées par le Conseil au cours du dernier exercice est resté stable par rapport à l’exercice précédent, 508 dossiers ayant été fermés. Le nombre d’affaires en instance s’est donc considérablement accru, en conséquence des nouveaux mandats, et il est à prévoir qu’il s’accroîtra encore davantage au cours du prochain exercice.

    Diagramme 1 - Volume d'affaires par exercice
    Diagramme 1 – Volume d’affaire par exercice Version texte
      2015–16 2016–17 2017–18 2018–19 2019–20
    Affaires reçues 716 511 489 495 675
    Affaires réglées 647 572 481 501 508

    Nombre d’affaires reçues par région

    Les bureaux régionaux du Conseil de Vancouver (Colombie-Britannique), de Toronto et de la région de la capitale nationale (Ontario), de Montréal (Québec) et de Dartmouth (Nouvelle-Écosse) se sont réparti la charge de travail comme l’illustre la carte ci-dessous : 

    Diagramme 2 – Affaires par région
    Diagramme 2 – Affaires par région version texte
      Région de l’Ouest Région de l’Ontario (+RCN) Région du Québec Région de l’Atlantique
    Région de l’Atlantique 200 affaires 215 affaires 215 affaires 45 affaires
    Diagramme 3 - Affaires reçues par type 2019-2020
    Diagramme 3 – Affaires reçues par type version texte
    Nombre total d’affaires : 675 2019–2020
    Accréditations 9,2 %
    RS 6,1 %
    CI 11,9 %
    Sécurité des employés (partie II) 10,7 %
    Autres 15,8 %
    PDT – DRJ 21 %
    PDT – Autre 14,5 %
    Révisions et réexamens 10,8 %

    Pratiques déloyales de travail

    Les plaintes de pratiques déloyales de travail (PDT), y compris les plaintes de manquement au devoir de représentation juste (DRJ), constituent la majeure partie des affaires reçues sous le régime de la partie I du Code. Le Conseil déploie des efforts considérables pour venir en aide aux parties dans ces affaires, afin d’appuyer leurs démarches visant à résoudre leurs litiges. En 2019-2020, 42 % des plaintes de PDT ont été résolues sans que le Conseil ait à trancher l’affaire.

    Les plaintes de manquement au DRJ constituent la plus grande partie des plaintes de PDT. Le nombre de plaintes de manquement au DRJ s’est accru cette année, passant à 142 comparativement à 116 l’année dernière. En plus de proposer aux parties des options pouvant permettre de régler leurs litiges dans ces affaires, le Conseil en tranche également environ un tiers grâce à une évaluation préliminaire des plaintes (appelée l’analyse de l’existence d’une preuve prima facie). Cela permet au Conseil de faire un triage des plaintes et d’y donner suite le plus efficacement possible.

    Diagramme 4 - Plaintes de manquement au devoir de représentation juste réglées
    Diagramme 4 – Plaintes de manquement au devoir de représentation juste réglées version texte
      2017–2018 2018–2019 2019–2020
    Accueillies 0 % 2 % 1,6 %
    Rejetées faute de preuve prima facie 46 % 30 % 27,6 %
    Rejetées 34 % 43 % 48 %
    Retirées 20 % 25 % 22,8 %
    Total 127 122 127

    Demandes d’accréditation et de révocation

    Les demandes d’accréditation constituent également une part importante des affaires reçues sous le régime de la partie I du Code. Toutefois, en 2019-2020, le nombre de demandes d’accréditation a décru par rapport à l’exercice précédent, passant de 85 à 64. Le pourcentage des demandes d’accréditation accueillies a augmenté cette année, passant à 81 %, comparativement à 74,7 % en 2018-2019. Le nombre de demandes de révocation a également diminué, passant à 13, comparativement à 21 l’année précédente. Au cours de la même période, le pourcentage des demandes de révocation qui ont été accueillies a également décru, passant de 73,7 % en 2018-2019 à 57,1 % en 2019-2020. 

    Diagramme 5 -Demandes d’accréditation
    Diagramme 5 – Demandes d’accréditation version texte
      2017–2018 2018–2019 2019–2020
    Accueillies 70,9 % 73,8 % 81 %
    Rejectées 11,4 % 11,9 % 10,3 %
    Retirées 17,7 % 14,3 % 8,6 %

     

    Diagramme 6 - Demandes d’révocation
    Diagramme 6 – Demandes de révocation version texte
      2017–2018 2018–2019 2019–2020
    Accueillies 50 % 72,2 % 57,1 %
    Rejetées 50 % 27,8 % 35,7 %
    Retirées 0 % 0 % 7,1 %

    Délais de traitement

    En 2019-2020, le délai de traitement moyen des dossiers d’affaires du Conseil a été de 179 jours, soit environ six mois. Ce chiffre comprend toutes les étapes du traitement d’une affaire, comme l’obtention des observations écrites des parties, la proposition de séances de médiation, la tenue d’une audience au besoin et la rédaction d’une décision écrite. Il s’agit d’une amélioration par rapport à l’exercice précédent. Toutefois, cela demeure supérieur aux délais de traitement des dernières années, lorsque le nombre d’affaires reçues était inférieur.

    Diagramme 7 - Délai de traitement moyen (en jours)
    Diagramme 7 – Délai de traitement moyen (en jours) version texte
    2015–2016 2016–2017 2017–2018 2018–2019 2019–2020
    138 176 164 193 179

    Au cours de l’exercice financier 2019-2020

    Le Conseil a rendu 191 décisions sous forme de décisions-lettres et 21 sous forme de motifs de décision, ainsi que 173 ordonnances.

    42 % des plaintes de pratique déloyale de travail ont été réglées sans qu’une décision du Conseil soit nécessaire.

    Deux accréditations ont été renouvelées sous le régime de la Loi sur le statut de l’artiste.

    Décisions

    Le Conseil s’efforce de rendre rapidement des décisions, fondées en droit et cohérentes d’une affaire à l’autre, de manière à établir une jurisprudence claire et fiable. Le Conseil rend des motifs de décision détaillés lorsqu’il s’agit d’affaires d’intérêt national ou qui feront jurisprudence. Dans les autres affaires, le Conseil rend des décisions-lettres concises, ce qui accélère le processus décisionnel et apporte des solutions plus rapides aux parties dans leurs litiges en matière de relations du travail.

    En outre, le Conseil décide de certaines affaires en rendant une ordonnance résumant sa décision. Le temps qu’il faut à un banc du Conseil pour rédiger et rendre sa décision, une fois l’audition de l’affaire terminée, est l’un des éléments qui expliquent le délai de traitement. Un banc peut statuer sur une affaire sans tenir d’audience, en s’appuyant sur la preuve écrite et sur les documents au dossier, comme les rapports d’enquête et les observations présentées par écrit, ou il peut mettre une audience au rôle, afin d’obtenir des éléments de preuve et des observations supplémentaires qui lui permettront de trancher l’affaire. La tenue d’une audience, ainsi que la durée de celle-ci, a une incidence sur le délai de traitement global.

    Diagramme 8 - Dossiers d'affaires réglé
    Diagramme 8 – Dossiers d’affaires réglés version texte
      2017–2018 2018–2019 2019–2020
    Sans audience 87,11 % 83,63 % 83,66 %
    Avec audience 12,89 % 16,37 % 16,34 %

    Le paragraphe 14.2(2) du Code prévoit qu’un banc doit rendre sa décision et en notifier les parties dans les 90 jours suivant la prise en délibéré ou dans le délai supérieur précisé par le président du Conseil. Le Conseil a atteint cet objectif, puisque le temps moyen qu’il lui a fallu pour rendre ses décisions pendant l’exercice 2019-2020 a été de 87 jours. Le Conseil continue à démontrer son engagement et sa détermination à maintenir son taux de règlement des affaires de manière à garantir qu’aucun arriéré de dossiers à traiter ne se crée.

    Demandes de contrôle judiciaire

    Une autre mesure du rendement du Conseil, ainsi que de la qualité et de la justesse de ses décisions, est la fréquence des demandes de contrôle judiciaire visant des décisions du Conseil, et le pourcentage de décisions confirmées à l’issue de ces contrôles. À cet égard, le Conseil continue de maintenir un rendement très satisfaisant. 

    Au cours de l’exercice 2019-2020, 13 demandes de contrôle judiciaire ont été présentées à la Cour d’appel fédérale. Trois d’entre elles ont été rejetées, alors que les autres affaires étaient toujours en instance à la fin de l’exercice.

    Au cours de la même période, deux demandes de contrôle judiciaire ont été déposées à la Cour fédérale. 

    Section 4 – Changements et défis à venir

    Nouveaux mandats et arbitres externes

    Depuis l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions du Code canadien du travail (le Code) en juillet 2019, les plaintes et les demandes d’appel présentées au Conseil canadien des relations industrielles (le Conseil) en vertu de la partie II et de la partie III du Code sont d’abord assignées à des agents du Conseil, qui travaillent avec les parties pour tenter d’arriver à un règlement. Cela est conforme à la pratique et aux procédures établies du Conseil dans le cadre du mandat qui était déjà le sien.

    Lorsque le Conseil doit trancher une plainte de congédiement injuste, une demande d’appel relative à une affaire en recouvrement du salaire ou une demande d’appel concernant des instructions données dans une affaire de santé et sécurité, le président peut attribuer cette tâche à un vice-président du Conseil ou, au besoin, à un arbitre externe. Un arbitre externe nommé par le président exerce, relativement à l’affaire à l’égard de laquelle il est nommé, toutes les attributions que le Code confère au Conseil, et les ordonnances et décisions qu’il rend, ainsi que les instructions qu’il donne, sont réputées être des ordonnances, décisions ou instructions du Conseil.

    Au cours de l’exercice 2019-2020, la majorité de ces nouveaux dossiers ont été soit réglés grâce à la médiation, avec l’aide des agents du Conseil, soit tranchés par les vice-présidents du Conseil. Toutefois, le nombre d’affaires continuant de croître, des ressources décisionnelles supplémentaires seront nécessaires.

    À l’automne 2019, le Conseil a annoncé sur son site Web un processus visant à établir une liste d’arbitres externes qualifiés, expérimentés, impartiaux, dynamiques et ayant déjà acquis de la crédibilité au sein de la communauté des relations du travail canadienne, qui pourraient être désignés pour instruire ces affaires. L’objectif était de circonscrire un petit groupe d’arbitres provenant de différentes régions, qui feraient profiter le Conseil de leurs antécédents diversifiés et lui apporteraient un large éventail d’expérience et d’expertise.

    La présidente a réalisé des entrevues et continue de le faire au besoin à partir des candidatures présentées dans le cadre de ce processus. Le Comité de consultation de la clientèle du Conseil a également été invité à donner son avis sur les critères de sélection et sur la liste de candidats proposés. Ce travail se poursuivra au cours du prochain exercice afin de garantir que le Conseil ait à sa disposition les ressources décisionnelles dont il a besoin pour faire face à sa charge de travail accrue.

    Nouvelles technologies

    Des efforts sont actuellement déployés en collaboration avec le Secrétariat du Conseil pour développer et mettre en œuvre un nouveau système de gestion des affaires qui tirera parti des technologies modernes et améliorera notre capacité à communiquer par voie électronique. Nos nouveaux outils électroniques nous permettront de proposer le dépôt de documents en ligne ainsi qu’un guichet unique grâce auquel les utilisateurs des services du Conseil pourront communiquer les documents et renseignements relatifs à leurs affaires. Le nouveau système de gestion des affaires devrait également nous permettre de rationaliser certains de nos processus opérationnels et d’optimiser certaines de nos procédures de travail.

    La transition vers un environnement opérationnel moderne et technologiquement avancé est attendue au cours de l’exercice 2020-2021. Il s’agira, comme c’est le cas chaque fois qu’une transition a lieu, d’un changement important pour les membres et le personnel du Conseil, ainsi que pour les utilisateurs. Au cours des prochains mois, pendant que ces changements seront apportés, des efforts ciblés seront investis dans la formation et dans les communications afin de garantir que le nouvel environnement et la nouvelle façon de procéder soient bien compris.

    Audiences virtuelles

    À la fin de l’exercice 2019-2020, les activités du Conseil ont subi le contrecoup direct du début de la pandémie mondiale de COVID-19. Les bureaux du Conseil ont été fermés dans tout le pays, et les employés et les membres du Conseil ont rapidement été en mesure de travailler à distance et de continuer à traiter les affaires et à assurer les services nécessaires. Des audiences en personne ont dû être annulées, et de nombreuses affaires ont été suspendues pour un certain temps. Le Conseil a rapidement envisagé des solutions de rechange et a été en mesure de tenir des audiences et des réunions virtuelles au moyen de la plateforme Zoom. Dans un avenir rapproché, le Conseil continuera à tenir des audiences, des conférences préalables aux audiences, des réunions ainsi que des séances de médiation par téléconférence ou vidéoconférence.

    Le Conseil continue également, conformément à sa pratique établie, à trancher un nombre important de demandes et de plaintes en se fondant seulement sur les observations écrites des parties, sans qu’une audience soit nécessaire. Cela a permis au Conseil de maintenir son taux d’affaires réglées et de traiter des affaires sans retard.

    Il ne fait aucun doute que les défis occasionnés par la pandémie mondiale ont suscité des discussions sur de nouvelles façons de travailler et une réflexion sur des manières novatrices de résoudre les litiges et de statuer sur les affaires. 

    Section 5 – Décisions clés

    Conseil canadien des relations industrielles

    Obligations du représentant patronal

    Parrish & Heimbecker, limitée, 2019 CCRI 915

    Parrish & Heimbecker, limitée (P&H), en tant qu’employeur membre, a déposé une plainte auprès du Conseil en vertu du paragraphe 34(6) du Code canadien du travail (le Code) contre son représentant patronal, l’Association des employeurs maritimes (AEM). P&H alléguait que l’AEM avait manqué au devoir de représentation juste (DRJ) auquel elle était tenue en établissant une pratique (la pratique des 2 h 40) de concert avec l’Association internationale des débardeurs (AID), en violation des dispositions relatives aux pauses et aux besoins en main-d’œuvre de la convention collective. P&H alléguait également qu’en raison de l’application de la pratique des 2 h 40, un accident impliquant un employé de l’AID s’était produit à bord d’un de ses navires et avait causé des dommages importants.

    En se fondant sur les observations présentées dans le cadre de cette affaire, le Conseil a relevé cinq questions précises à trancher : 1) L’AEM avait-elle agi de manière arbitraire et de mauvaise foi, puisqu’elle savait que la pratique des 2 h 40 contrevenait à la convention collective et qu’elle n’avait pas cherché à y mettre fin? 2) L’AEM avait-elle agi de manière arbitraire et de mauvaise foi en refusant de présenter un grief au nom de P&H relativement à l’accident avec la goulotte de chargement survenu le 1er juillet 2018? 3) L’AEM avait-elle agi de manière discriminatoire du fait que la pratique des 2 h 40 ne s’appliquait qu’aux employeurs membres menant des activités dans le secteur céréalier? 4) L’AEM avait-elle agi de manière arbitraire dans son enquête sur l’accident avec la goulotte de chargement survenu le 1er juillet 2018? 5) L’AEM avait-elle agi de mauvaise foi lors des dernières négociations collectives pour des raisons directement liées à de l’hostilité et à de l’animosité à l’endroit de P&H?

    Afin de trancher ces questions, le Conseil devait d’abord déterminer l’étendue de sa compétence et la nature du DRJ auquel un représentant patronal est tenu envers ses membres en application du paragraphe 34(6) du Code. À cette fin, le Conseil a examiné sa jurisprudence peu abondante sur le paragraphe 34(6) ainsi que les principes généraux établis dans sa jurisprudence sur l’article 37.

    Le Conseil a conclu qu’il était constamment affirmé, dans sa jurisprudence limitée sur le paragraphe 34(6), que le DRJ qui incombe à un représentant patronal en application de ce paragraphe est similaire au DRJ auquel un syndicat est tenu en vertu de l’article 37 du Code. Comme dans le cas d’une plainte de manquement au DRJ déposée contre un syndicat en vertu de l’article 37, le rôle du Conseil, dans l’évaluation d’une plainte de manquement au DRJ déposée par un employeur membre contre un représentant patronal, consiste à examiner le processus suivi par ce représentant patronal pour donner suite aux préoccupations soulevées par son membre. Le rôle du Conseil n’est pas d’évaluer la justesse de la décision prise par le représentant patronal ni d’agir comme une instance d’appel relativement à cette décision. Par conséquent, un employeur membre peut seulement reprocher au représentant patronal d’avoir adopté à son endroit une conduite arbitraire, discriminatoire ou entachée de mauvaise foi alors que le représentant patronal s’acquittait de ses obligations. Ayant reconnu ces similitudes, le Conseil a ensuite souligné les différences importantes entre l’article 37 et le paragraphe 34(6). Plus précisément, le Conseil a fait remarquer que la portée du DRJ prévu à l’article 37 et au paragraphe 34(6) n’est pas identique. Alors que l’article 37 vise expressément les «  droits reconnus... par la convention collective  », le paragraphe 34(6) concerne l’exécution des obligations imposées au représentant patronal sous le régime de la partie I du Code. Ayant ainsi défini la portée du paragraphe 34(6) et les distinctions à faire par rapport aux plaintes fondées sur l’article 37, le Conseil a appliqué ces notions aux questions à trancher.

    En ce qui concerne la première question soulevée, le Conseil n’a pas été en mesure de conclure que l’AEM avait agi de manière arbitraire ou de mauvaise foi en acceptant et en continuant d’appliquer la pratique des 2 h 40 qu’elle avait précédemment négociée avec l’AID. Lorsqu’il s’est penché sur la question de savoir si le DRJ d’un syndicat s’applique dans le contexte de modifications apportées à une convention collective ou dans le cadre d’ententes conclues pour modifier des conditions de travail qui ne sont pas régies par la convention collective, le Conseil a établi que, pourvu que la conduite du syndicat n’ait rien d’arbitraire ou de discriminatoire et qu’elle soit exempte de mauvaise foi, rien n’empêche un syndicat et un employeur de modifier des dispositions d’une convention collective pendant que celle-ci est en vigueur, ni de s’entendre sur des dispositions excédant la portée de cette convention collective. Le Conseil a indiqué que rien n’empêchait d’appliquer ce même principe à un représentant patronal choisi en vertu de l’article 34 dans le secteur du débardage. Le Conseil a ensuite conclu que P&H n’avait présenté aucun élément de preuve démontrant que l’AEM n’avait pas tenu compte des intérêts de P&H, ou avait agi de manière arbitraire ou de mauvaise foi, en continuant d’appliquer la pratique des 2 h 40 qu’elle avait depuis longtemps négociée avec l’AID.

    En ce qui concerne la deuxième question, le Conseil a conclu que la décision de l’AEM de ne pas présenter de grief au nom de P&H n’avait pas été prise de manière arbitraire ou de mauvaise foi. En examinant la jurisprudence peu abondante concernant les plaintes fondées sur le paragraphe 34(6), le Conseil a constaté que, lorsque les faits d’une plainte fondée sur le paragraphe 34(6) sont semblables à ceux que le Conseil voit normalement dans les plaintes fondées sur l’article 37, le Conseil se fonde généralement sur sa jurisprudence concernant l’article 37, en procédant par analogie. Dans des décisions antérieures qui traitaient de la jurisprudence relative aux plaintes fondées sur le paragraphe 34(6), le Conseil a conclu que, comme dans le cas des plaintes fondées sur l’article 37, un représentant patronal a le pouvoir discrétionnaire exclusif de décider de poursuivre ou non le traitement d’un grief. Le Conseil a réaffirmé qu’il ne remettra pas en question et n’examinera pas en appel la décision d’un syndicat de renvoyer ou non un grief à l’arbitrage, et qu’il ne substituera pas son propre avis à celui du syndicat sur le renvoi d’un grief à l’arbitrage, pour autant que la décision n’ait pas été prise de manière arbitraire ou de mauvaise foi. En appliquant ces notions aux faits de l’affaire, le Conseil a conclu que l’AEM avait enquêté sur les circonstances de l’accident et avait choisi un plan d’action qu’elle jugeait approprié. Aucun élément de preuve témoignant de mauvaise volonté, d’hostilité, de malhonnêteté ou d’animosité personnelle ne permettait de conclure à une conduite entachée de mauvaise foi.

    En ce qui a trait à la troisième question, le Conseil a conclu que P&H ne s’était pas acquittée du fardeau qui lui incombait de prouver que la pratique des 2 h 40 était discriminatoire parce qu’elle ne s’appliquait qu’aux employeurs exerçant des activités dans le secteur de la manutention des grains. P&H avançait qu’une pratique pouvait tout de même être discriminatoire si elle ne traitait pas tous les membres de manière égale pour des raisons arbitraires ou déraisonnables. Cependant, le Conseil a conclu que P&H n’avait pas expliqué en quoi l’application de la pratique des 2 h 40 était illégale, arbitraire ou déraisonnable. Le Conseil a conclu que la pratique des 2 h 40 reposait sur un raisonnement qui conciliait efficacement les intérêts des employés de l’unité de négociation et ceux des employeurs membres du secteur céréalier. Ainsi, la décision de l’AEM d’accepter l’application de la pratique des 2 h 40 n’était pas déraisonnable, car elle permettait cette conciliation.

    Relativement à la quatrième question, le Conseil a jugé que l’enquête de l’AEM n’avait pas été arbitraire. Le Conseil a souligné que, lorsqu’il évalue une plainte fondée sur l’article 37, il n’évalue pas le bien-fondé du grief d’un employé et ne tire pas de conclusions à ce sujet. Le Conseil peut toutefois «  analyser les faits pour déterminer si l’enquête menée par le syndicat reflétait la valeur et le sérieux [du] cas [de l’employé]  » (voir McRaeJackson, 2004 CCRI 290). Dans l’affaire qui nous intéresse, le Conseil n’a pas été en mesure de conclure que l’AEM avait agi d’une manière qui aurait permis de croire que son enquête n’avait été que superficielle ou de pure forme.

    Enfin, en ce qui concerne la dernière question, relative à une conduite entachée de mauvaise foi durant la dernière ronde de négociations collectives, le Conseil a jugé que l’AEM n’avait pas agi de mauvaise foi. Le Conseil considère depuis longtemps que, dans le cadre des plaintes fondées sur l’article 37, il doit faire preuve de déférence à l’égard des décisions prises par un syndicat dans un contexte de négociations collectives. Le Conseil n’a vu aucune raison de s’écarter de cette approche consistant à évaluer le processus suivi durant les négociations collectives dans le cadre d’une plainte fondée sur le paragraphe 34(6). Après avoir examiné les observations des parties, le Conseil n’a pas été en mesure de conclure que l’AEM avait fait preuve d’hostilité, d’animosité ou de mauvaise foi envers P&H durant la dernière ronde de négociations collectives, laquelle avait mené à la conclusion d’une nouvelle convention collective.

    Cour d’appel fédérale

    Demande d’accréditation

    Canadian Airport Workers Union v. International Association of Machinists and Aerospace Workers and Garda Security Screening Inc., 2019 FCA 263

    La Cour d’appel fédérale (CAF) a confirmé les politiques de longue date du Conseil concernant la preuve d’adhésion et les demandes visant à déloger le syndicat en place. La CAF a rejeté une demande de contrôle judiciaire présentée par le Canadian Airport Workers Union (CAWU) relativement à la décision rendue par le Conseil dans Sécurité préembarquement Garda inc., 2018 CCRI 878. Dans cette décision, le Conseil a rejeté la demande du CAWU visant à déloger le syndicat en place, au motif que la preuve d’adhésion n’était pas fiable et que, de toute façon, cette preuve d’adhésion ne démontrait pas que le CAWU avait l’appui de la majorité exigé pour qu’un scrutin de représentation soit tenu. Dans cette affaire, le Conseil a suivi sa politique de longue date consistant à déléguer ses pouvoirs d’enquête à ses agents des relations industrielles (ARI) et à leur demander de lui communiquer des rapports d’enquête confidentiels.

    Lors du contrôle judiciaire, le principal argument du CAWU était qu’il y avait eu déni d’équité procédurale, car le Conseil avait tranché sa demande visant à déloger le syndicat en place sur le fondement des rapports confidentiels des ARI, sans divulguer ces rapports aux parties. Lesdits rapports contenaient les résultats de l’enquête des ARI sur la preuve d’adhésion, et confirmaient que la preuve déposée par le CAWU à l’appui de sa demande était entachée d’irrégularités importantes. Le Conseil avait refusé de divulguer ces rapports aux parties afin de protéger la confidentialité de la volonté des employés, conformément à l’article 35 du Règlement de 2012 sur le Conseil canadien des relations industrielles.

    En fin de compte, la CAF a estimé que le droit du CAWU à l’équité procédurale n’avait pas été violé par la non-divulgation des rapports. La CAF a reconnu que le droit du CAWU de savoir ce qu’il devait démontrer, et sa capacité de le faire, ont pu être limités par des considérations liées au droit du travail, notamment la nécessité de protéger la confidentialité de la volonté des employés. Cependant, ces contraintes étaient bien connues et étaient sanctionnées par les tribunaux depuis de nombreuses années. La CAF a également noté que, bien que le CAWU n’ait pas été en mesure d’aborder des cas précis d’irrégularité, il connaissait – ou aurait dû connaître – les questions visées par l’enquête des ARI, puisque l’agent négociateur accrédité avait soulevé ces questions dans sa réplique à la demande du CAWU visant à le déloger. Par conséquent, rien n’empêchait le CAWU de présenter au Conseil des éléments de preuve à l’appui de sa position à cet égard.

    La CAF a également confirmé la politique de longue date du Conseil consistant à n’ordonner un scrutin de représentation, par suite d’une demande visant à déloger un syndicat en place, que si le syndicat demandeur peut démontrer qu’il a l’appui de la majorité des membres de l’unité de négociation au moyen d’une preuve d’adhésion juste et fiable – ce que le CAWU avait été incapable de faire dans cette affaire. Cette politique a pour objectif de préserver la paix industrielle en garantissant que les employés souhaitent sérieusement changer d’agent négociateur et qu’ils ont exprimé leur volonté avec sincérité en adhérant au syndicat qui cherche à remplacer le syndicat en place.

    Contrôle judiciaire des décisions du Conseil postérieures à l’arrêt Vavilov

    Hélicoptères canadiens limitée (faisant affaire sous le nom de Hélicoptères canadiens Offshore) c. SIEPB, 2020 CAF 37

    La Cour d’appel fédérale (CAF) a rejeté la demande de contrôle judiciaire, avec dépens, ayant conclu que la décision du Conseil n’était pas déraisonnable. Elle a appliqué le cadre d’analyse révisé de la norme de contrôle et les lignes directrices établis par la Cour suprême du Canada (CSC) dans les arrêts Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Vavilov, 2019 CSC 65 (Vavilov) et Société canadienne des postes c. Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, 2019 CSC 67.

    Hélicoptères Canadiens limitée (HCL ou l’employeur) a demandé le contrôle judiciaire de la décision Hélicoptères Canadiens limitée faisant affaire sous la raison sociale Hélicoptères Canadiens Offshore, 2018 CCRI 891 (RD 891), dans laquelle le Conseil avait accueilli la plainte déposée en vertu du paragraphe 24(4) par le Syndicat international des employées et employés professionnels(les) et de bureau (le syndicat). Dans la plainte, il était allégué que l’employeur avait enfreint les dispositions sur le gel énoncées au paragraphe 24(4) du Code canadien du travail. Après la présentation de la demande d’accréditation, HCL avait embauché des pilotes temporaires pour répondre aux exigences d’un contrat d’approvisionnement de courte durée avec British Petroleum, selon des conditions différentes de celles qui s’appliquaient aux pilotes existants relativement à la rémunération des heures supplémentaires et au calendrier de travail. La plainte portait sur la question de savoir si la décision de l’employeur d’embaucher des pilotes temporaires selon des conditions différentes correspondait au «  maintien du statu quo  », en particulier dans une situation où HCL prétendait avoir amorcé ses activités de recrutement et de calcul des coûts avant que la demande d’accréditation soit présentée.

    Par suite de la décision de la CSC dans l’affaire Vavilov, la CAF a demandé et reçu des observations écrites des parties concernant l’incidence du cadre d’analyse révisé de la norme de contrôle. HCL affirmait que ni le raisonnement suivi par le Conseil ni la décision rendue en conséquence n’étaient raisonnables. Selon HCL, il ressortait de la preuve qu’elle avait commencé à planifier l’embauche de pilotes temporaires bien avant la date de la demande d’accréditation. Elle affirmait également que la décision rendue dans la RD 891 n’était pas conforme à la jurisprudence confirmant que les dispositions sur le gel n’empêchent pas les employeurs de tenter de s’adapter à des circonstances changeantes.

    Le syndicat estimait que la position de HCL équivalait simplement à un désaccord avec les conclusions de fait du Conseil et qu’il fallait faire preuve de retenue à l’égard des conclusions de fait. Le syndicat soutenait que le raisonnement du Conseil était inattaquable; le Conseil n’avait trouvé aucun élément de preuve démontrant que les conditions différentes s’inscrivaient dans la poursuite des activités selon ce qui prévalait avant la présentation de la demande d’accréditation. Par conséquent, le Conseil avait conclu à juste titre que les changements apportés ne correspondaient pas au «  maintien du statu quo  » et constituaient une violation des dispositions sur le gel.

    La CAF a convenu que les conclusions de fait du Conseil étaient déterminantes dans cette affaire, car elles menaient directement à la conclusion que les changements contestés allaient au-delà du «  maintien du statu quo  ». 

    En se fondant sur le dossier dont disposait le Conseil, la CAF a jugé que la conclusion n’était pas déraisonnable. Étant donné que HCL avait choisi de ne pas fournir de preuve directe du modèle de calcul des coûts qu’elle avait adopté, ou de ce qui avait été communiqué aux candidats pendant le processus de recrutement, la CAF a estimé qu’elle n’avait aucun motif d’intervenir dans la décision du Conseil de ne pas tirer de conclusions plus favorables à la position de l’employeur à partir du dossier qui était à sa disposition.

    À cet égard, la CAF a rappelé l’observation formulée dans l’affaire Vavilov selon laquelle les cours de révision doivent s’abstenir d’apprécier à nouveau la preuve examinée par le décideur.

    La CAF a fait remarquer qu’elle n’avait pas pris en considération un argument possible qu’elle avait soulevé relativement au critère à deux volets concernant les dispositions sur le gel établi dans l’arrêt Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce, section locale 503 c. Compagnie Wal-Mart du Canada, 2014 CSC 45, puisque cet argument n’avait pas été invoqué devant le Conseil.